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Virus, bactéries, microbes… Quelle différence ?

    Microbes, virus, bactéries… Ces trois termes sont employés pour désigner les responsables de nos maladies, souvent sans faire bien connaître ce qui existe derrière chacun d’eux. Je vous propose aujourd’hui de rectifier le tir avec quelques bases de microbiologie. C’est parti ?

    Qu’est-ce qu’un microbe ?

    Le vivant, un monde de micro-organismes

    Etymologiquement, le terme « microbe » vient du grec et signifie « petite vie » – de « mikrós », « petit » et « bíos », « vie ». On parle aussi de micro-organisme.

    C’est en 1878 que le chirurgien français Charles Sédillot introduit le mot « microbe » pour désigner toutes les formes de vie invisibles à l’œil nu : les levures, certains champignons, des algues vertes unicellulaires, des planctons, des planaires – vers plats aquatiques – et bien d’autres encore ! Ces micro-organismes doivent être observés au microscope : pour cause, ils sont 100 à 10 000 fois plus petits qu’un grain de sable.

    Les microbes, en plus d’avoir l’honneur d’être les premières formes de vie apparues sur Terre il y a environ trois milliards d’années, se trouvent dans tous les milieux – aquatique, terrestre, aérien – et de récentes études ont montré que les micro-organismes représentent à peu près 50 % des cellules présentes dans notre corps.

     En réalité, une part importante du monde vivant est constituée de microbes.

    Algues verts unicellulaires vues au microscope
    Algues verts unicellulaires vues au microscope.

    La théorie microbienne de Louis Pasteur

    A peine un mois après l’annonce du Dr. Sédillot, Louis Pasteur et son équipe présentent à l’Académie de Médecine leur théorie microbienne, aussi nommée « théorie des germes » ou « théorie pathogénique » et ses applications dans les domaines de la médecine et de la chirurgie. Cette hypothèse, très controversée à ses débuts, postule que de nombreuses maladies sont causées par des micro-organismes. C’est elle également, qui servira de base pour les travaux de Pasteur sur la vaccination.

    Ce n’est que quelques décennies plus tard, au début du XIXe siècle, que le postulat est enfin validé. Il a ainsi mené à d’importantes innovations hygiénistes et médicales et constitue l’un des fondamentaux de la médecine moderne.

    Cependant, la théorie des germes de Louis Pasteur a également contribué à ancrer dans le langage commun une association négative : les microbes sont des bactéries et virus pathogènes – c’est-à-dire « qui provoquent des maladies ».

    Qu’est-ce qu’une bactérie ?

    Les  procaryotes, premiers êtres vivants sur Terre

    Schéma en coupe de l’organisation simplifiée d’une bactérie
    Schéma en coupe de l’organisation simplifiée d’une bactérie.

    Nous l’avons vu, les bactéries sont des microbes. Il s’agit d’organismes généralement unicellulaires – constitués d’une seule cellule –, bien qu’il existe des spécimens pluricellulaires – à plusieurs cellules donc, mais vous aviez suivi n’est-ce pas ? Les bactéries sont entourées d’une membrane cellulaire et disposent d’ADN mais, contrairement aux cellules, ces organismes sont dépourvus de noyau. C’est pourquoi on les qualifie de procaryotes, du latin « pro », « avant » et du grec « karyon », « noyau ». En effet, les bactéries font partie des premiers êtres vivants apparus sur notre planète, bien avant l’apparition des cellules à noyau, dites « eucaryotes ».

    Les bactéries sont des être autonomes qui vivent dans tous les milieux, même les plus extrêmes et sont capables d’assurer les fonctions liées à leur survie :

    • se reproduire pour transmettre leur matériel génétique (ADN),
    • se nourrir via l’énergie et les ressources de leur environnement.

    Des bactéries de tailles et formes variées

    Différentes formes de bactéries
    Différentes formes de bactéries. Gauche : bâtonnets / Milieu haut : spirilles / Milieu bas : fusiformes / Droite : coques.

    Les bactéries mesurent en moyenne autour d’1 µm, soit un millionième de mètre – 50 fois plus fin qu’un cheveu – et présentent des formes variées. On trouve ainsi ces microbes sous forme :

    • sphérique, que l’on appelle coque ;
    • de bâtonnet, que l’on appelle bacille ;
    • incurvée, que l’on nomme vibrion ;
    • de fuseau, que l’on nomme fusiforme ;
    • spiralée, que l’on appelle spirille.

    Certaines bactéries sont également dotées d’un flagelle, une sorte de queue qu’elles utilisent pour se mouvoir dans leur environnement.

    De nombreux critères peuvent être pris en compte pour le classement des bactéries : forme, taille, bactéries à Gram (+) ou à Gram (-), etc.

    Une majorité microbienne inoffensive pour une minorité pathogène

    Le corps humain héberge quelque 100 000 milliards de bactéries, soit environ 10 fois plus que le nombre de cellules qui le composent. A tel point que de récentes études avancent aujourd’hui que chaque être humain disposerait de sa propre identité bactérienne ! Les bactéries sont ainsi présentes dans tout notre organisme, ce qui conduit à de nombreuses recherches médicales, en particulier autour du microbiote intestinal – pour approfondir le sujet, je vous recommande la lecture de l’excellent ouvrage, très accessible, de Giulia Enders : Le charme discret de l’intestin, Editions Acte Sud, 2015.

    La majeure partie de ces micro-organismes que nous abritons est inoffensive, voire bénéfique dans certains cas. Elle nous aide à digérer ou contribue à notre immunité, entre autres. Néanmoins, certaines bactéries sont à l’origine de maladies courantes comme l’angine, mais également de pathologies graves à l’instar de la tuberculose, de la peste ou du choléra.

    Qu’est-ce qu’un virus ?

    Schéma en coupe simplifiée d’un virus de type enveloppé
    Schéma en coupe simplifiée d’un virus de type enveloppé.

    Si l’on inclut généralement les virus dans la catégorie des microbes, cette opinion ne fait pas consensus au sein de la communauté scientifique. En effet, les virus ont un mode de vie parasitaire et sont de plus en plus admis comme étant acaryotes – c’est-à-dire dépourvus de noyau, de métabolites et de métabolisme propres. En conséquence de quoi, leur nature en tant qu’être vivant ou non est largement débattue.

    Le nom « virus » est issu du latin « uirus », qui signifie « jus, suc, humeur, venin, poison, infection, mauvaise odeur ».

    Il existe trois caractères fondamentaux, déterminés par André Lwoff en 1953, qui font des virus des entités originales.

    1. Leur génome ne contient qu’un seul type de matériel génétique, ADN ou ARN.
    2. Ils se reproduisent par réplication à partir de leur matériel génétique.
    3. Ce sont de parfaits parasites qui s’installent à l’intérieur des cellules pour se reproduire.

    Les virus se composent d’une capsule de protéines, appelée capside, qui protège le brin d’ADN ou d’ARN qu’ils contiennent. Certains disposent également d’une enveloppe qui protège la capside ; on les nomme « virus enveloppés », par opposition aux virus nus dont la capside est sans protection.

    Le virus, un agent infectieux parasitaire

    Les virus sont incapables de se reproduire de façon autonome : ils ont besoin d’une cellule-hôte. Vous êtes infecté par un virus pathogène ? Regardons ensemble comment la particule virale, appelée « virion », s’y prend pour se répliquer dans votre organisme – les puristes m’excuseront les raccourcis.

    1. Le virion va pénétrer dans une cellule de l’organisme à l’aide de protéines disposées sur sa capside, qui vont lui permettre de ne pas être perçu comme un danger.
    2. Une fois confortablement installé, la particule virale va libérer son matériel génétique dans la cellule-hôte pour la forcer à créer des copies du virus.
    3. De nouvelles particules virales sont conçues à l’aide du matériel génétique de la cellule-hôte et sont libérées dans l’organisme afin d’aller infecter de nouvelles cellules.

    Pour une représentation plus visuelle, je vous encourage à visionner cette courte vidéo de la chaîne Vaccine Makers Project, qui reprend simplement le cycle de vie d’un virus.

    De nombreuses maladies plus ou moins graves sont causées par les virus : la grippe, la varicelle, la mononucléose, mais aussi le SIDA – j’attire votre attention sur le fait que le SIDA n’est pas un virus, mais un syndrome causé par un virus : le VIH – ou la variole.

    Zoom sur le coronavirus

    Aujourd’hui et depuis début décembre 2019, une épidémie planétaire causée par un nouveau coronavirus originaire de Chine fait trembler les populations. Les symptômes ne sont pas sans rappeler ceux du SRAS – Syndrome Respiratoire Aigu Sévère – et peuvent être dangereux, voire létaux notamment dans le cas de personnes immuno-déprimées – dont le système immunitaire est affaibli : les enfants, les personnes âgées, les femmes enceintes, les gens atteints de maladies auto-immunes.

    Néanmoins, le coronavirus n’est pas uniquement lié à des maladies dangereuses qui risqueraient d’éradiquer la planète. Non, loin de là. Ce genre de virus infecte fréquemment les mammifères et les oiseaux et touche principalement les voies digestives et respiratoires. Ainsi, les banals rhumes hivernaux et gastro-entérites sont régulièrement le fait de coronavirus !

    Voici les miasmes que nous projetons dans l’air à chaque éternuement
    Voici les miasmes que nous projetons dans l’air à chaque éternuement. Alors on pense à se couvrir le nez, maintenant ? 1f609

    Les bactéries peuvent-elles être contaminées par des virus ?

    Il n’y a pas que les êtes vivants pluricellulaires, comme les végétaux ou les animaux, qui peuvent être infectés par des virus. En effet, il est tout à fait possible pour une bactérie d’être contaminée par un virus. On parle de virus bactériophage (littéralement “qui mange les bactéries“).

    De manière générale, les virus sont beaucoup plus petits que les cellules bactériennes, ce qui leur permet de s’en servir comme hôte pour se reproduire.

    Chaque espèce de virus bactériophage ne s’attaque qu’à une seule espèce de bactérie. Du fait de cette correspondance, la recherche médicale se penche actuellement sur les virus bactériophages comme alternative aux antibiotiques. En effet, on note une résistance de plus en plus importante des bactéries à ce type de médicament : l’antibiorésistance.

    Ce phénomène commence à poser problème et peut s’avérer un véritable risque et défi sanitaire dans les prochaines années. De fait, si l’antibiorésistance devient trop importante, il est possible que des infections bactériennes que l’on sait traiter aujourd’hui deviennent mortelles demain ! D’où l’espoir qui repose sur les virus bactériophages.

    Virus ou bactéries, quand utiliser les antibiotiques ?

    Afin de clore ce dossier, il me semble important de faire un rapide point santé concernant la prise d’antibiotiques.

    On l’a entendu, dit et répété maintes et maintes fois depuis des années: « Les antibiotiques, c’est pas automatique ! ». En effet, si vous avez bien suivi, les antibiotiques permettent de lutter contre les être vivants pathogènes.

    C’est pourquoi les pathologies dues aux bactéries, qui sont des micro-organismes autonomes, peuvent être combattues à l’aide d’antibiotiques.

    Au contraire, les pathologies virales ne le peuvent pas, du fait qu’un virus se « cache » dans vos cellules pour se répliquer. Dans ce cas les antibiotiques, qui n’agissent pas contre les cellules, ne feraient qu’altérer les bonnes bactéries que vous hébergez naturellement dans votre organisme.

    Enfin, avant toute prise d’antibiotiques – surtout pas d’automédication !-, rendez-vous chez votre médecin qui vous fera passer un antibiogramme afin de déterminer la bactérie qui vous rend malade et vous donner les antibiotiques associés !

    Mémento

    Les microbes, ou micro-organismes, regroupent tous les êtres vivants invisibles à l’œil nu – virus, bactéries, algues, levures, champignons, etc. – et vivent partout autour de nous.

    Les bactéries possèdent leur propre métabolisme et, si certaines provoquent des maladies, beaucoup sont neutres ou bénéfiques pour notre organisme.

    Les virus sont incapables de se répliquer sans infecter une cellule-hôte et leur position dans le règne vivant fait toujours débat parmi les scientifiques.

    On peut prendre des antibiotiques pour lutter contre une maladie bactérienne, mais pas contre une maladie virale.